Histoire

Une si longue absence


"- Eh, bonjour toi..." me lance l'humain juste devant moi. J'ai un peu sursauté en entendant sa voix. C'est qu'il est arrivé sans faire de bruit, le bougre ! Enfin, il n'a pas l'air bien méchant malgré son accoutrement, au contraire. Sa voix est douce et a quelque chose de réconfortant. Ouep... Bonjour l'humain...

Au fait, je ne me suis pas présenté. Moi, je m'appelle Dyron, les humains prononcent ça "Dailleronne" et je suis un Rottweiler âgé de 11 ans. D'après ma maîtresse, je suis même "le plus beau de tous les Rottweiler de la planète" ! Parfois même, elle dit "de l'univers" ! D'ailleurs, elle me l'a encore dit juste avant de m'attacher ici. Oh ! Je ne suis pas malheureux, mes maîtres m'attachent souvent ainsi. Il paraît que c'est parce que je ne suis pas admis dans leurs magasins, alors j'attends toujours dehors. Et attention : j'attends très sagement, même si parfois je m'inquiète un peu de ne pas les voir revenir assez vite. C'est qu'ils mettent parfois beaucoup de temps à choisir ces humains... de vrais indécis ! Enfin, je sais par expérience qu'il vont revenir avec plein de bonnes choses et, si je suis assez sage (ce qui est toujours le cas), j'aurai peut-être droit à mon petit quignon de pain tout droit sortit de chez la boulangère. J'adore ça quand il est encore tout chaud... hummm... Ce que j'ai faim...

Mes maîtres disent que je suis un ventre à pattes, un glouton, voire un goinfre, bref, que j'ai tout le temps faim. Ce n'est pas faux, mais tout de même, il faut bien dire que ça les arrange parfois ! Ceux qui s'en accommodent le mieux, ce sont les enfants. Ah, les enfants ! Je ne vous avais pas dit que mes maître en avaient deux ? Non ? Et bien alors je le fais, dès que l'humain devant moi aura fini de me caresser la tête... Et bien alors, il y a Jordan, le grand de 12 ans et puis la petite Emilie qui n'a que 4 ans. Elle, c'est ma meilleure copine ! J'avais 7 ans quand ma maîtresse est revenue d'une longue absence avec la toute petite Emilie dans un tout petit panier. Elle a grandit près de moi et je lui ai appris plein de bêtises. Souvent, elle me prend pour un poney et elle grimpe sur mon dos en riant... Elle est un peu lourde, bien sur, mais rien ne me fait plus plaisir que de la voir rire. Sacrée Emilie ! Dire que je n'aurai jamais pu jouer avec elle si mes maîtres n'étaient pas venus me chercher au refuge. Oh ! De ça nous plus je ne vous en ai pas parlé

Je ne me souviens plus trop de ma jeunesse et, il faut bien être honnête, je préfère ne pas m'en souvenir... mais ce dont je me rappelle nettement, ce sont le refuge et ses odeurs si particulières de détresse mêlée d'espoir... J'entends encore les jappements suppliants de tous mes frères de galère. Tous... non. Car il est vrai que certains d'entre nous se laissaient mourir... Le refuge, je ne veux plus y retourner ! D'autant que moi, avec mes 68 centimètres pour 50 kilos, j'étais catalogué parmi les chiens dangereux et je sentais bien que l'on pensait sérieusement à me faire payer cette tare. Mais non, ouf ! Ils sont venus, mes deux humains à moi et il m'ont fait sortir de cet enfer pour m'accueillir dans leur foyer... notre foyer ! Que d'amour ils me donnent, que d'affection... et que de fidélité je leur promet en retour ! Ah, mes maîtres...

"- Tu es fatigué bonhomme..."

Ah, tiens. Je l'avais presque oublié celui-là avec son casque sur la tête. Non mais quelle idée de s'habiller de cette façon par cette chaleur. Les humains ont parfois des mœurs étranges... Remarquez, j'aurai du m'en douter puisqu'il était écrit, à l'entrée de cette forêt, qu'il s'agissait d'un camp d'entraînement militaire et qu'il était strictement défendu d'y pénétrer. Alors ça ressemble à ça un militaire à l'entraînement ? Il a le regard bien triste pour un homme de guerre. Comme s'il venait de voir quelqu'un mourir... Et moi, je ne me sens pas le courage de soutenir ce regard bien longtemps. Je n'ai pas trop le moral. Sans mes maîtres, je me sens seul. Et puis je suis tellement fatigué, avec cette canicule... je n'ai qu'une envie : dormir.

Cela fait plusieurs fois, même si je ne sais pas compter, que le soleil se lève et se recouche, de l'autre côté des arbres. Mes maîtres n'avaient jamais été si longs à faire leurs courses... et je ne saurai jamais s'ils sont revenus, finalement...

Seby

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